Voiture 101 : une équipe qui roule (I/VI)

1922 fut un millésime d’exception pour la littérature sportive. Antoine Blondin, né à Paris quelques mois avant Pierre Chany du côté de Langeac, ont d’abord cultivé les différences avant de faire le bonheur des lecteurs de l’Equipe. L’Auvergnat a fait ses armes dans la presse communiste, couvrant ses premiers Tours de France pour Ce Soir, tandis que le Parisien noircissait encore les pages de l’hebdomadaire monarchiste Ici France. Puis les deux talents ont été réunis dans la voiture 101, chargée de coller aux roues du peloton du Tour pour que les reporters de L’Equipe vivent la course au plus près des champions. Pierre Chany de 1953 à 1987, rejoint par Antoine Blondin entre 1954 et 1982, ont été des frères de route sans équivalent pour transmettre les enjeux et la dramaturgie du Tour. Pour célébrer les 100 ans de leur naissance, le site letour.fr livre quelques échantillons piochés parmi leur immense production. Des morceaux choisis écrits sur une sélection de lieux qui seront visités par le Tour 2022.

Roubaix,  3 juillet 1967  

« Jimenez sur un pied d’égalité avec Gimondi »  

Pour sa 54e édition, le Tour renoue avec les équipes nationales. La France de Raymond Poulidor et du tenant du titre Lucien Aimar fait face au Hollandais Jan Janssen, ainsi qu’au redoutable Italien Felice Gimondi, vainqueur du Giro. Sur ce parcours particulièrement montagneux qui emmène le peloton au Puy-de-Dôme et sur le Mont Ventoux en plus des Alpes et des Pyrénées, le grimpeur espagnol Julio Jimenez est aussi regardé comme l’un des prétendants crédibles. Mais à l’époque déjà, la rencontre avec les pavés de l’Enfer du Nord en première semaine sème la panique dans le peloton. À l’arrivée au vélodrome de Roubaix, c’est bien le soulagement de « l’horloger d’Avila » qui est mis en scène dans le papier de Pierre Chany : 


« Si nous accordons à Julio Jimenez un ordre préférentiel dans cette préséance journalistique, c’est que son comportement sur les routes de l’Enfer, et son classement à Roubaix constituent bel et bien le fait essentiel de la journée. De tous les concurrents qui appréhendaient, à juste titre semblait-il, cette étape stratégique, Julio Jimenez était de loin le plus angoissé. Il portait dans les poches de son maillot le poids de toutes les misères espagnoles et dans son esprit le souvenir des défaillances spectaculaires et définitives de son aîné Federico Bahamontes. La lecture des journaux lui avait révélé que Jacques Anquetil, un  expert, craignait qu’il ne laisse dans le boyau de Mons-en-Pévèle toutes ses chances de gagner le Tour. Lors de son récent séjour à Clermont-Ferrand, Raphaël Géminiani lui avait répété, Dieu sait combien de fois : « Julio, fais bien gaffe à cette étape : ou tu passes et tu gagneras le Tour, ou tu perdras cinq minutes et adieu la montre en or ».


Une fois rendu à Paris, la prophétie de Geminiani n’est pas totalement respectée, puisque Julio Jimenez termine 2e à 3’40’’ de Roger Pingeon, et en remportant pour la troisième fois le classement des grimpeurs. Le coureur espagnol, qui a remporté au total 12 étapes sur les grands tours cyclistes, est décédé à l’âge de 87 ans le 8 juin dernier.   

balmanion (franco)  jimenez (julio)  pingeon (roger)
balmanion (franco) jimenez (julio) pingeon (roger) © PRESSE SPORTS
jimenez (julio)  pingeon (roger)  balmanion (franco)
jimenez (julio) pingeon (roger) balmanion (franco) © PRESSE SPORTS

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