Leur Bretagne à eux (III/V)

La Bretagne est à l’honneur sur le parcours du Tour de France 2021, avec un grand départ organisé à Brest et quatre étapes visitant les quatre départements de la région. Et bien que le record de 14 Bretons établi en 1958 soit hors d’atteinte, le peloton 2021 accueillera une petite dizaine de « régionaux du départ » qui vivront à coup sûr une séquence d’émotion et de fierté. Cinq d’entre eux racontent pour letour.fr leur Bretagne, des souvenirs d’enfance à leur rapport à la culture régionale… sans jamais s’éloigner très longtemps du vélo.
S’il devra attendre l’issue des championnats de France pour connaître la sélection définitive de son équipe Arkea-Samsic, la saveur d’un quatrième Tour de France serait unique pour Elie Gesbert, après avoir connu une année de blessures, d’opérations et de soins. Également atteint il y a quelques semaines par le virus Covid-19, le Briochin a repris de belles couleurs sur le Tour d’Occitanie (6e) et entend bien renouer avec le destin heureux qui l’a lié dès la naissance avec la Grande Boucle.

Elie Gesbert : « Le maillot Gwen-ha-Du, ça en impose »

Né le 1er juillet 1995 à Saint-Brieuc (22)
Equipes successives : FDJ (2015), Fortuneo-Vital Concept (2016-2017), Fortuneo-Oscaro (2017), Fortuneo-Samsic (2018), Arkea-Samsic (2019-2021)
Principaux résultats :
2012 : champion de Bretagne juniors (cyclo-cross), vainqueur du Challenge National juniors
2013 : champion de France juniors (c-l-m. + course en ligne), champion de Bretagne juniors, médaillé d’argent des championnats d’Europe juniors
2014 : champion des Côtes-d’Armor
2015 : vainqueur d’étape sur le Tour de l’Avenir
2016 : vainqueur du Tour de Basse-Navarre, vainqueur d’étape sur la Ronde de l’Isard, vainqueur du Grand Prix de Rennes
2017 : vainqueur d’étape sur le Tour de Bretagne, vainqueur d’étape sur le Tour du Limousin (2e du classement général)
2019 : 5e du Tour d’Oman (meilleur jeune)
2021 : vainqueur d’étape sur le Tour d’Algarve
Palmarès Tour de France : 2017, 85e / 2018, 86e / 2019, 78e  

gesbert (elie) - (fra) -
gesbert (elie) - (fra) - © PRESSE SPORTS
Tour de France 2018 - 11/07/2018 - Etape 5 - Lorient / Quimper (204,5km)
Tour de France 2018 - 11/07/2018 - Etape 5 - Lorient / Quimper (204,5km) © ASO/Pauline BALLET
21 February 2019 10th Tour of Oman Stage 06 : Muscat - Muttrah Corniche GESBERT Elie (FRA) Arkea - Samsic, 1st of the Young Rider Classification Photo : Yuzuru SUNADA
21 February 2019 10th Tour of Oman Stage 06 : Muscat - Muttrah Corniche GESBERT Elie (FRA) Arkea - Samsic, 1st of the Young Rider Classification Photo : Yuzuru SUNADA © PRESSE SPORTS

Un coin de Bretagne
L’Armorique est une terre de légendes et de créatures mystérieuses. Ce n’est pourtant pas une fée qui s’est penchée sur le berceau d’Elie Gesbert, mais l’un des baroudeurs les plus efficaces des pelotons de la fin du XXe siècle. Le 1er juillet 1995 est resté dans les annales du cyclisme pour une chute fatale aux espoirs de victoire de Chris Boardman sur le prologue de Saint-Brieuc, profitant à Jacky Durand qui avait eu l’inspiration de s’élancer sur le parcours avant que l’orage n’éclate. L’histoire retiendra peut-être qu’au même moment dans la maternité de la ville, un bébé champion prénommé Elie lâchait son premier souffle, et allait montrer bien plus tard qu’il n’en manquait pas. « Je suis né à Saint-Brieuc mais j’ai grandi dans le village d’Andel, immédiatement à côté de Lamballe », détaille le jeune homme qui a tout de même aiguisé ses cuissots sur les routes de la baie de Saint-Brieuc, qui continuent de le combler. « C’est le coin que je préfère, c’est pour moi la plus belle des mers. Les criques, le granit, le Cap Fréhel… c’est vraiment superbe. Et pour s’entraîner, ça me correspond aussi, avec beaucoup de routes un peu casse-pattes ». Le coureur d’Arkea-Samsic s’est à peine déplacé depuis l’époque où il a commencé la compétition, à 9 ans en VTT puis ensuite sur la route. Tout juste a-t-il parcouru une dizaine de kilomètres pour s’installer à Planguenoual : « Je m’y sens bien, je me suis un peu plus rapproché de la mer. Au mois de décembre, bien sûr, on pense quelquefois à partir, mais je serais malheureux sans mes proches et tout cet environnement ».

Esprit breton
Il n’y a pas plus breton que la musique bretonne. Dans sa version contemporaine ou plus traditionnelle, elle emporte d’emblée Elie Gesbert, sensible à ces sonorités inimitables et capables de transmettre l’esprit des lieux : « J’aime beaucoup Matmatah, un groupe de rock des années 2000, ou alors Denez Prigent, qui fait davantage de la musique fest-noz folk, du 100 % breton. C’est très ancré comme musique, ils parlent de la Bretagne et ils la chantent ». S’il s’accorde avec l’idée largement répandue que « les Bretons sont un peu têtus, fermés, mais ils restent très chaleureux », Elie se reconnait davantage dans le côté voyageur qu’on leur prête communément : « Le Breton est un baroudeur, c’est certain. Et le nombre de drapeaux bretons que l’on voit partout dans le monde en est un signe. Lorsque j’ai fait le Tour d’Utah en 2016 par exemple, il y avait un Gwen-ha-Du sur le bord de la route, ça m’avait fait sourire ».

gesbert (elie) - andel velo sport  - CHAMPIONNAT DE FRANCE DE CYCLISME DE L'AVENIR - CHAMPIONNAT DE FRANCE COURSE SUR ROUTE JUNIORS - SAISON - 2013/2014 - ALBI
gesbert (elie) - andel velo sport - CHAMPIONNAT DE FRANCE DE CYCLISME DE L'AVENIR - CHAMPIONNAT DE FRANCE COURSE SUR ROUTE JUNIORS - SAISON - 2013/2014 - ALBI © PRESSE SPORTS
BAGNERES-DE-LUCHON, FRANCE - JULY 24: Elie Gesbert of team FORTUNEO-SAMSIC during the stage 16 of the Tour de France 2018 on July 24, 2018 in Carcassonne / Bagnères-de-Luchon, France. (Photo by James Startt/Agence Zoom)
BAGNERES-DE-LUCHON, FRANCE - JULY 24: Elie Gesbert of team FORTUNEO-SAMSIC during the stage 16 of the Tour de France 2018 on July 24, 2018 in Carcassonne / Bagnères-de-Luchon, France. (Photo by James Startt/Agence Zoom) © PRESSE SPORTS
gesbert (elie) - (fra) -
gesbert (elie) - (fra) - © PRESSE SPORTS

Terre de vélo
Bien que l’on identifie difficilement les raisons historiques du succès de la pratique cycliste dans la région, la dynamique qui permet de faire émerger des champions parait limpide en écoutant les souvenirs d’Elie Gesbert sur ses premières années de compétition : « Pour un jeune qui aime le vélo, c’est le meilleur endroit pour se développer, pour progresser et se sentir soutenu. Tous les week-ends il y a quatre courses dans le département, quatre autres dans celui d’à-côté. On est porté par le public, il y en a sur toutes les courses, quel que soit le temps ». Dans ces conditions, un adolescent intègre vite les réflexes et la mentalité de la compétition. La densité de talents aidant, le jeune Elie a compris en accumulant les succès et en multipliant les voyages que sa formation avait été dispensée sur une terre pas comme les autres : « En juniors, j’ai été champion de Bretagne et le niveau était très relevé, rappelle-t-il. Alors quand le week-end suivant, on débarque sur les championnats de France avec ce maillot, on n’est pas exactement le même coureur. On sent bien qu’on ne nous regarde pas de la même manière, le maillot Gwen-ha-Du, ça en impose ».

Le Tour en Bretagne
Les visites régulières du Tour de France en Bretagne font partie du lien que les habitants entretiennent avec le cyclisme et permettent aux plus jeunes d’entre eux d’élargir leurs perspectives, de viser encore plus haut. Le phénomène a parfaitement fonctionné sur Elie Gesbert : « La première fois que j’ai vu passer le Tour, c’était en 2011, à côté de chez moi à Planguenoual, à une petite trentaine de kilomètres de l’arrivée au Cap Fréhel. Juste à l’endroit où nous étions placés, nous avons assisté à une attaque de Thomas Voeckler. J’étais rêveur en le voyant et ça m’a donné envie d’être un jour dans le peloton. Inconsciemment, au moins ». Le rêve est justement devenu réalité en 2017, où il était le plus jeune coureur du peloton, et à nouveau en 2018, cette fois-ci pour un passage en Bretagne : « on ne passait pas très loin de chez moi et je connaissais bien l’arrivée à Mûr-de-Bretagne. C’était quelque chose, surtout avec le maillot d’une équipe bretonne. Il y avait encore plus de public qu’ailleurs, c’était grisant. Malheureusement j’avais chuté la veille de cette étape, donc je n’étais pas au mieux ».
Cette année, Elie a déjà connu son lot de galères et peut donc se projeter avec enthousiasme et appétit sur le séjour du Tour en Bretagne. Il ne s’interdit d’ailleurs pas d’essayer de devenir le premier Breton vainqueur d’une étape bretonne depuis Bernard Hinault (1985, c-l-m. de Plumelec), en tablant un peu sur la réussite : « En étant dans une équipe bretonne, on se mettra forcément la pression de bien faire les choses. Il faut rêver, il faut espérer. Ce serait une énorme consécration… mais si je gagne à Mûr-de-Bretagne, j’aurai du mal à repartir le lendemain ».

Leur Bretagne à eux… les épisodes précédents, à découvrir ou à relire :
. Cyril Gautier : « Les bagadoù, ça me file des frissons » (I/V)
. Valentin Madouas : « Un Breton ça ne lâche jamais rien, c’est persévérant » (II/V)

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